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1 avril 2012 7 01 /04 /avril /2012 16:35

Cependant, il n'y a pas que les jeunes dieux fringants de la deuxième génération qui sont amoureux. La preuve : Hadès, dieu du royaume des morts.

 

Hadès s'ennuyait ferme au fond des Enfers. Il trouvait qu'en fin de compte, dans le partage du monde, il s'était fait blouser, parce que les morts, c'est bien joli, mais leur conversation n'est pas très vivante. Il pouvait bien essayer de passer le temps avec une quelconque Erinye, ou une Gorgone diverse, et autres monstres infernaux, mais à part pousser des ricanements sarcastiques et murmurer des malédictions à l'égard de tous les mortels, elles ne savaient pas dire grand-chose. Bref, ce brave Hadès se morfondait tant qu'il envoya des récriminations à Zeus.

 

Et quand le dieu des morts envoie des récriminations à Zeus, il hurle, terrifiant les Moires qui essayent de le calmer, puis lui disent : "Parle à ton frère Zeus, il résoudra le problème...".

 

Hadès s'adresse donc à Zeus par Hermès (qui circule entre ciel et Enfers quotidiennement) interposé :


- Hé, frérot, qu'est qu'on se fait (censuré ; pas de vulgarité ici, ce blog est sérieux) ici ! Y'a aucune jolie fille ! Toi, tu t'es réservé la terre et le ciel, avec toutes les belles déesses et les jolies mortelles, pendant que moi, je reste planté là à m'ennuyer tout seul, comme un pauvre célibataire... Je mourrai vieux, moche et tout seul...
- Bon, vieux et moche, peut-être, mais mourir, ça m'étonnerait, lui répondit le roi des dieux (toujours par Hermès interposé). Mais je comprends ce que tu veux dire. Tu veux une meuf, c'est ça ?
- Evidemment ! Tu te les gardes toutes !
- Ben tiens, regarde, je t'en ai laissé une. Il y a une déesse, une de mes filles, qui se balade sur terre, je te la donne si tu veux.

Et Hadès leva les yeux (ben oui, les Enfers, c'est sous terre) et vit une jolie jeune déesse qui folâtrait
sur la chatoyante terre de Sicile, cueillant des fleurs avec ses amies déesses et divinités dans l'herbe verte et brillante sous le ciel d'été.

 

Hadès, conquis, s'écrie :


- Waw mais c'est qui ce canon ?
- Elle s'appelle Koré, répond Zeus. C'est la fille que j'ai eue avec Déméter. Mais je dois t'avertir qu'il y a de la concurrence : t'as Arès et Apollon qui sont intéressés. Mais Déméter veut pas qu'on lui enlève sa fille. Tu sais qu'elle est un peu maman poule... Alors elle a planqué sa fille en Sicile, avant d'aller prendre le thé avec Maman Rhéa. Mais bon, on va s'arranger sans elle. J'en parle à Aphrodite, OK ?


Hadès n'hésite pas un instant et accepte.

 

276px-Dante_Gabriel_Rossetti_-_Proserpine.JPG

[Koré selon Dante Gabriel Rossetti. Quand elle vous regarde de cet air féroce, on n'a pas trop envie de faire des calembours débiles sur son nom. Allez ris, Koré (oups, pas pu résister).]

 

Malheureusement, tout comme  pour son neveu Apollon, les plans drague, ce n'est pas le fort du Dieu des Morts. Hadès se voit mal s'approcher de la belle Korè en lui contant florette... Non, c'est un direct, le Hadès, un brutal. Pas le genre à déclamer des vers ou à perdre son temps en techniques de séduction. D'ailleurs le temps, c'est de l'argent, et Hadès est un Dieu Riche et tient à le rester.


La belle jeune déesse était occupée à tisser dans le palais de sa moman en Sicile quand Aphrodite, qui était dans le coup, lui dit : "Comme il fait beau ! Et si tu allais faire un tour cueillir des fleurs ?" Korè, dont c'est le grand trip de cueillir des fleurs, fait : "Chic ! J'y cours !" (Eh oui, elle est un peu gamine la Korè...). Elle court prévenir ses copines les Océanides, et toutes vont faire des bouquets dans les vertes prairies en lançant des rires cristallins et en se racontant des histoires de filles. (quelle horreur)


Mais Hadès surveillait tout d'en-dessous, pendant que Zeus (le papa, je rappelle) surveillait d'au-dessus. Comme Korè se penchait dans l'herbe, le roi des dieux créa aussitôt une jolie fleur blanche d'une espèce nouvelle ; Korè se dit : "mais quelle jolie fleur !", tendit la main pour la cueillir, mais au moment même où elle en coupait la tige, la terre s'ouvre dans un grondement terrible, Hadès en surgit sur son char noir attelé de chevaux écumants, terrifiant les Océanides qui s'égayent en tous sens - et chope Korè qui gémit et hurle de peur.

 

Paris_bordone_015.gif

[Hadès est aussi l'auteur de la version trash de La drague pour les Nuls.]


Une Nymphe s'interpose, une certaine Cyané : "Vous ne passerez pas !" crie-t-elle au dieu. Hadès s'esclaffe, saisit son sceptre, rouvre la terre et disparaît dans les profondeurs en poussant un ricanement infernal. Cyané, désespérée, fond en larmes : elle fond tellement en larmes qu'elle se change en ruisseaux. Et pendant ce temps, Hadès emportait la petite déesse avec la ferme intention de la balancer sur son lit pour en faire son quatre heures.


Pardon, vous aviez dit quoi ? Subtilité, classe, romantisme ? Connais pas.

 

Sources : Claudien, De Prosperpinae Raptu ; "Homère", Hymnes ; Ovide, Métamorphoses.

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